UNESCO – Journée internationale de la langue maternelle 2024

Non Par Gilles

Le 21 février, l’OMEP était présente à l’UNESCO pour la célébration de la Journée internationale de la langue maternelle, initiée en 1999 par le Bangladesh. Cet événement vise à réaffirmer l’engagement de l’UNESCO en faveur de la diversité linguistique.
Une présentation de cette journée est disponible ici.

© UNESCO/Montakarn Suvanatap

Stefania Gianini, sous-directrice générale pour l’éducation à l’Unesco, a souligné combien il est important de préserver la diversité des langues :

  • Les élèves apprennent mieux dans la langue qu’ils possèdent ;
  • Les enfants qui reçoivent un enseignement dans une langue qu’ils parlent à la maison ont 30 % plus de chances de savoir lire à la fin de l’école primaire que ceux qui ne parlent pas la langue d’enseignement ;
  • Apprendre dans sa langue renforce l’estime de soi et de la pensée critique ;
  • La réalisation ODD4 est liée à la diversité linguistique ; il convient donc de promouvoir l’éducation dans la langue maternelle.

L’ambassadeur de la Norvège a souligné que le pays était établi sur les territoires de deux peuples qui possèdent le même droit à développer leur langue et leur culture (Samis et Norvégiens), il s’agit d’un droit constitutionnel. Pour mieux répondre à la diffusion des langues autochtones, il importe de développer une « technologie des langues maternelles » pour les langues Samies (claviers, correction orthographique,…). Il y a assez peu de locuteurs et les grandes compagnies agissent peu à ce sujet. Les technologies du langage sont importantes pour les langues minoritaires, adapter le format numérique à ces langues leur permettra de ne pas disparaître. 

Le représentant de la secrétaire générale de la francophonie a souligné l’attachement de l’OIF à la diversité culturelle qui permet une construction de la compréhension du monde et du développement cognitif, l’exercice de la pensée critique, favorise la créativité et les compétences sociales. L’éducation multilingue est un droit fondamental. 

La session portant sur l’éducation multilingue a permis de prendre connaissance de plusieurs initiatives pour le développement d’une éducation en langue autochtone : 

  • Un MOOC aux USA pour l’apprentissage de langues autochtones (4 modules sur 8 semaines à raison de 3 à 4 heures hebdomadaires
  • Des vidéos en langues autochtones au Bengladesh, à partir des pratiques des communautés. Elles sont beaucoup plus consultées que celles qui sont en anglais (« 10 minutes d’école »)
  • Un concours de la « nouvelle plurilingue » organisé avec l’Inalco, avec une contrainte linguistique qui consiste à écrire en plus d’une langue, ainsi que des éditions d’œuvres hétérolingues/plurilingues (avec l’école Estienne) 
  • Un projet de bibliothèque numérique en langue autochtone pour l’Afrique, « Snapplify », récompensé par l’Unesco 

Noro Andriamieseza, spécialiste de programmes éducatifs à l’Unesco, a fait état d’une étude de l’Unesco sur l’inclusion par les langues au niveau des établissements. 5 recommandations apparaissent :

  • Investir dans une politique de langue inclusive à l’échelle de l’école et de la communauté scolaire ;
  • Mettre l’accent sur l’amélioration des ressources et des pratiques ; 
  • Valoriser le respect de la diversité des langues à l’école et le rendre visible dans l’environnement de l’école ;
  • Exploiter le répertoire multilingue des élèves dans les processus d’apprentissage ; 
  • Assurer l’inclusion des langues autochtones dans l’éducation. 

Durant la session sur l’intergénérationnel, les interventions ont permis de souligner qu’il n’y a plus besoin aujourd’hui d’expliquer en quoi la langue maternelle est essentielle pour l’éducation, pour la transmission culturelle, qu’il s’agit d’un marqueur d’identité qui relie à une mémoire collective et donne le sens de l’appartenance en renforçant l’identité culturelle des populations indigènes. Elle a aussi permis de relever qu’il faudrait plus de législation sur la place des langues, avec des politiques claires et applicables. 

Plusieurs exemples de pratiques innovantes ont également été proposés :

  • Promotion de la pratique du multilinguisme pour favoriser l’égalité des chances et lutter contre les discriminations dans tous les pays, par l’association DULALA ; en France un enfant sur 4 grandit avec une autre langue que le français au quotidien ; pour cela il faut mettre en place une « hospitalité langagière » où toutes les langues sont les bienvenues, que ce soit pour parler ou simplement comprendre une autre langue ;
  • Des écoles où toutes les langues parlées par les élèves ont leur place : ainsi la St Janschool à Amsterdam, publique et socialement mixte, où 30 langues sont représentées. Il s’agit de créer un environnement favorable à l’apprentissage des langues (« language-friendly ») pour les élèves et leurs parents. L’enseignement se fait en néerlandais et en anglais, mais les élèves peuvent choisir leurs compagnons de langue préférée, les parents sont invités à traduire des mots dans la langue de la maison, les enseignants proposent de traduire des mots importants dans les langues utilisées par les enfants et comparent les langues durant les cours. 
  • Ces pratiques s’inscrivent dans le projet porté par la fondation Rutu pour l’inclusion et l’égalité des langues qui anime 50 écoles dans 11 pays, sans financements publics. Elle a conçu un réseau éducatif guidé par la culture autochtone ( « Indigenous-Led ») qui consiste à se centrer sur les savoirs de la communauté et à les transmettre à l’école. Une première école « indigineous language friendly » a été ouverte au Surinam. 

Pour conclure cette séance Rokhaya Diawara, responsable de programme à l’Unesco et Justine Sass, cheffe de section, ont souligné que les langues sont essentielles pour l’inclusion que les technologies peuvent être un appui. Surtout, il faut noter que le cadre légal existe, et que les politiques cherchent à prendre des décisions. Il s’agit maintenant de relier les partenaires pour que l’éducation intergénérationnelle soit une réalité.